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Mixes et interview du DJ/conférencier Babaliah (ex-Palmwine Records)
Fondateur du collectif Palmwine Records, Renaud Beliah aka Babaliah est un authentique activiste. Du dancefloor aux salles de classe, il multiplie les casquettes et les actions. Que ce soit en tant que DJ-Producteur ou enseignant-conférencier, il s’adonne à la transmission du savoir par la musique et son histoire. Il donne une « confécoute » dédiée aux Antilles au Sucre. Un jour avant l’événement, RTU part à sa rencontre et à la découverte de son univers :
Babaliah : interview
La présentation de ton activité musicale et professionnelle ? (Palmwine Records, Babaliah, mixes, productions)
Je m’appelle Renaud BELIAH et mon nom pour les activités artistiques est Babaliah depuis une dizaine d’années, l’époque à laquelle je suis devenu papa. Je suis professeur des écoles, DJ et digger, conférencier et beatmaker… J’ai commencé à rechercher des disques vinyls en 99. A l’époque mon background était Jazz/Blues/Hiphop/Reggae et en passant au vinyl, j’ai rapidement commencé à explorer d’autres genres de musique black, en particulier en squattant les bacs de l’excellent disquaire lyonnais Sofa.
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A force de ramasser beaucoup de disques en vide grenier et de découvrir des compilations dédiées à différents pays, je me suis mis à collectionner de manière plus organisée que compulsive, en utilisant les possibilités folle d’internet, d’Ebay par exemple. L’idée d’une discothèque universelle à commencé à prendre forme. Du coup je ne suis pas un collectionneur extrêmement pointu dans chacun des domaines que j’explore, mais plutôt complet en musiques du monde de l’âge d’or. Il y a une nombre important de pays du monde pour lesquels je peux faire une belle sélections de gros tracks, et je continue mes recherches et mes acquisitions pour que ce nombre augmente.
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Cette manière de rechercher des disques me donne une vision plus universelle des choses. J’ai pu commencer il y a 7 ans la série des Babaliah Loves. C’est une série de mixs enregistrés et publiés avec un visuel facilement identifiable pour faire découvrir les musiques du monde des années 60 et 70 à un public assez large, des mélomanes curieux aux DJ/diggers spécialisés, des jeunes qui veulent trouver une partie de leurs racines aux humanistes qui veulent comprendre certains aspects du monde.
Les mixs/sélections de la série Babaliah Loves ne sont faites qu’avec des disques originaux et sont organisées par thèmes : pays ou espace culturel, artiste, genre musical.
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Les premiers étaient exclusivement dédiés à la musique noire, mais depuis un peu plus de deux ans, j’ai élargi le champ et il y a eu plusieurs sélections européennes ou asiatiques et il y en aura de nombreuses autres, puisque je vais essayer d’alterner entre Afrique, Amérique/Caraïbe, Europe et Asie dans les prochains mois, en publiant si possible une sélection par semaine.
D’ici quelques années, je pense que j’aurai produit un nombre conséquent de sélections donnant une photo de l’âge d’or des musiques du monde dans une centaine de pays, en tout cas c’est mon objectif.
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Mes DJ sets ont aussi évolué avec ma discothèque, et maintenant, en fonction du thème de la soirée je peux jouer sur différents espaces culturels. J’ai joué en tant que DJ dans pas mal de soirées depuis une quinzaine d’année, dans pas mal de villes. Au début, mes sets étaient montés sur des compilations et des rééditions de musique tropicale et funky, d’Afrique, du Brésil etc.
Petit à petit , de nombreux genres moins funky ont pris leur place, et depuis quelques années, les espaces explorés sont plus nombreux. Il y a 9 ans, j’ai lancé Palmwine Records, et j’ai progressivement rassemblé dans Palmwine des DJ/Diggers de musique tropicale pour qu’à Lyon il y ait des soirées régulières dédiées à la musique africaine caribéenne et latine des années 70.
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C’était pour moi une très belle expérience, et il y a eu de nombreuses soirées qui ont apporté quelque chose à la région. Mais mon éloignement géographique, mon travail d’enseignant et ma vie de famille ne m’ont plus permis d’être actif dans Palmwine et je n’en suis plus membre depuis des années. Je suis cependant toujours proche d’ORL, de Groovy J, de Jean Toussaint, de Mambo Chick, de James Stewart ou de Black Soul Bro qui réveillent les dancefloors de Paris, Lyon, Genève et de nombreuses villes en France et en Europe.
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Le beatmaking est plus un passe temps qui me suit depuis bientôt 20 ans, par intermittence, avec quelques réussites, un remix d’Anthony Joseph sur un maxi Heavenly Sweetness en écoute ici.
Au début j’ai fait des beats hip hop, puis j’ai tenté d’orienter vers l’Afrobeat, les musiques latines. Souvent avec une sonorité électro, voire robotique. Je compose des lignes plus que je boucle. C’est complémentaire du reste mais je vois ça plutôt comme une activité ludique et un à côté. Devant un dancefloor, il m’arrive de partir dans cette direction musicale beaucoup plus moderne, mais c’est rare. Je privilégie plutôt les disques 70’s poussiéreux proposés dans un contexte contemporain de danse. C’est ce que j’aime aussi écouter et jouer.
Il y a Babaliah le DJ-producteur et Renaud Beliah l’enseignant-conférencier. Quelles sont les convergences et divergences entre les deux ?
Au départ, ces deux activités étaient bien séparés et même se concurrençaient dans mon emploi du temps et dans mon projet professionnel à long terme. Pourtant, dans l’enseignement, dès la première année, j’ai rapidement voulu mettre de la musique, comme pilier central d’un enseignement interdisciplinaire par exemple.
L’Interdisciplinarité et l’Universalité se sont révélés avec le temps les deux concepts importants dans mon activité et ont permis tout naturellement une convergence entre mes deux pôles professionnels. La compréhension du monde est interdisciplinaire. Mon attirance pour la musique est liée à l’Histoire, à la Géographie, aux autres arts et en particulier à la Littérature, à la Politique aussi.
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En étant professeur des écoles, on peut, tout en restant dans le cadre des programmes, mettre en œuvre un enseignement interdisciplinaire qui accroche les disciplines pour donner du sens aux apprentissages.
La musique peut avoir une place force dans ce type de démarches. Au même titre que la littérature ou les autres arts. L’Universalité dans l’enseignement est quelque chose de très novateur que j’ai eu la chance de pouvoir proposer à une école entière depuis 4 ans : prendre comme temps et comme espace le temps global et l’espace global des Hommes, et enseigner par projets interdisciplinaires de plusieurs semaines autours des différents espaces culturels humains pour permettre à chacune de trouver ça place d’humain, de citoyen du monde, de citoyen français et d’écolier, quelques soient ses origines (sociales, nationales, ethniques, religieuses…).
Par exemple, travailler pendant entre deux petites vacances, pendant 7 semaines, sur les Caraïbes :
- littérature antillaise : (en y accrochant compréhension, lecture, langage oral, production d’écrit, orthographe, grammaire, conjugaison, vocabulaire, mais aussi textes documentaires et textes prescriptifs ( recettes…))
- musique antillaise : ( écoute, production musicale et chant) Biguine et Bélé
- art visuels : peinture naïve Haïtienne
- Géographie : paysages maritimes, insulaires, francophonie, …
- Sciences : les volcans
- Histoire : la redécouverte de l’Amérique par C.Colomb, la traite transatlantique…
Depuis 4 ans, dans mon école, nous avons mené une douzaine de périodes de ce type sur toute l’école.
Dans le même temps, j’ai mis de l’enseignement dans mes activités musicales, en lisant, en recherchant, en faisant des conférences, en réfléchissant différemment l’évolution de ma discothèque et en y mettant plus d’Universel en sortant de mon espace de prédilection : les musiques noires.
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Le concept du cycle « L’Age d’Or des Rythmes Noirs »
Je vis à Bourg-en-Bresse où il y a une SMAC assez active, la Tannerie, à laquelle j’ai proposé ce cycle il y a 5 ans, avec, pour lancer les choses, l’appui de l’adjoint au maire aux affaires culturelles.
C’est un cycle de conférences musicales, que j’appelle aujourd’hui « confécoutes », qui s’intéresse aux musiques noires d’Afrique, d’Amérique et des Caraïbes. L’éclairage de la production musicale s’y veut interdisciplinaire : musicologique, historique, sociologique, littéraire… J’ai un micro, deux platines vinyles pour faire écouter les morceaux illustrant mon propos, et un diaporama. Là encore, le public visé est large. Je réfléchis le contenu pour qu’il soit accessible à tout le monde, qu’il soit assez riche pour les curieux et que même les spécialistes y trouvent de l’intérêt.
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J’ai mené une douzaine de séances à la Tannerie dont plusieurs d’introduction (Racines communes et interactions dans le Grand Atlantique Noir, Musique et politique) et un bon corpus d’espaces culturels (Colombie, Antilles françaises, Haïti, Ghana, Nigéria, Congo(s), Brésil, Afrique Lusophone, Mali, Guinée, …).
Ces confécoutes sont toujours prêtes à être proposées dans d’autres lieux, devant d’autres publics, à être modifiées, améliorées… Ce qui est intéressant dans le concept de la confécoute, c’est qu’il peut s’adapter à des lieux aussi différents que des bars, des boutiques de disques, des amphithéâtres universitaires, des médiathèques, des centres culturels…)
Le concept « Disque et Culture » (#1 Turquie, #2 Europe de l’Est, #3 Antilles…)
« Disques et Culture », c’est le nom de l’association que j’ai montée il y a 3 ans. C’est aussi un clin d’œil à une devise qu’on trouve au dos des pochettes de disques de certains pays comme le Brésil, mais avec le verbe « être » entre Disque et Culture : « Le disque, c’est la Culture », qui affirme que la musique, même populaire, fait partie de la culture des hommes, et que l’objet disque est plus que ce qu’il y paraît.
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J’ai proposé ce nom au Sucre pour les confécoutes que je propose chez eux dans le cadre d’ « Après le travail ». La première séance avait eu lieu il y a un an sur la Turquie, puis Europe de l’Est et aujourd’hui Antilles françaises. L’idée est de mettre encore plus en avant le disque comme médiateur culturel, dans un éclairage toujours interdisciplinaire de la production musicale des espaces traversés.
A plus ou moins long terme, j’espère pouvoir proposer des confécoutes sur de nouveaux espaces, comme l’Océan Indien, l’Asie du Sud Est, le Moyen Orient et le Maghreb en plus de toutes celles concernant le Grand Atlantique Noir.
La prochaine escale de tes aventures ?
Mes projets : avancer dans la série des Babaliah Loves, continuer de développer ma discothèque, faire quelques beats pour le fun, concevoir de nouvelles confécoutes, être invité à venir faire des sets dans de belles soirées, mais aussi donner de la visibilité au résultat de mes actions et recherches en pédagogie et monter progressivement une soirée régulière dans la région dédiée aux musiques 70’s d’Europe et d’Asie…
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RTU
mars 2nd, 2017
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